Nous sommes mi-mars, il pleut, il fait froid, et je dois être à 8 heures à l’autre bout du monde (Mortefontaine vue depuis Sud-Est parisien) pour essayer la voiture qui a le plus mauvais 0 à 100 Km/h du marché automobile français (en 19 secondes).
Je ne sais pas vraiment si c’est le meilleur état d’esprit pour aborder un essai, mais bon, il y a des jours comme ça où on voit tout en gris. D’ailleurs, arrivé sur place, Dacia nous propose tout une gamme de Dacia Spring… grises ! (je prends donc LA blanche).
Light is right ?
Je profite de la conférence de presse pour me réchauffer et pour essayer de finir de me réveiller lorsqu’un chiffre me fait bondir ! Ai-je bien entendu ? 970 Kg ? Non, j’ai dû me tromper… ce petit SUV serait juste 50 Kg plus lourd qu’une Lotus Elise 220, avec son châssis de voiture de course et sa carrosserie en fibre ? Ou 100 Kg plus légère qu’une Mazda MX5 qui pourtant n’est pas considérée comme une enclume ?
Mais pourtant, cette Dacia Spring est une voiture électrique, et comme tout le monde, je sais bien que les voitures électriques sont lourdes… m’aurait-on menti ? Où est le piège ?
Alors je pense un peu aux autres électriques du marché : la Renault ZOE est à 1500 Kg, la Peugeot e-208 à 1450 Kg, la Honda e à 1500 Kg, la Mini Cooper SE à 1350 Kg et même la BMW I3, avec son utilisation de fibre de carbone et d’aluminium, est à 1250 Kg.
Alors oui, on peut trouver la Citroën AMI à moins de 500 Kg, mais ce n’est pas une voiture (il s’agit d’un quadricycle à moteur, qui peut être conduit sans permis).
Alors la question est de savoir comment Dacia s’y est pris pour faire une voiture électrique qui se classe ainsi dans les voitures les plus légères du marché, tous types de motorisations confondues.
Peut-être ont-ils rogné sur l’autonomie ? Pas vraiment car avec 230 Km en cycles WLTP, si ça n’a rien de spectaculaire, c’est tout à fait acceptable pour une électrique dédiée à des trajets urbains et périurbains (et je ne parle même pas des 305 Km promis en ne se basant que sur la partie urbaine du cycle WLTP). A titre de comparaison, la Mini Cooper SE ne promet que 4 Km de plus (234 Km selon la norme WLTP).
Et là, le service presse de Dacia nous explique « l’astuce ». Si on avait été chez Lotus, on nous aurait uniquement dit que « le poids, c’est l’ennemi » (ou « light is right »), mais là, on nous explique juste qu’en mettant peu d’équipement, on gagne du poids, en gagnant du poids, on réduit la batterie, en réduisant la batterie, on gagne du poids, en gagnant du poids, on réduit la taille des freins, en réduisant la taille des freins, on gagne du poids, en gagnant du poids, on réduit encore la batterie…
Bref, on entre dans un cercle vertueux qui permet non seulement de proposer une voiture légère, avec une autonomie correcte, mais ceci est obtenu avec une petite batterie (de moins de 200 Kg pour 27,4 kWh, couverte par une garantie de 8 ans / 120.000 Km) qui permet de diminuer le prix d’achat de la voiture, mais aussi les coûts d’entretien (moins d’usure des pneus, des freins etc…).
Et tout ça, dans une voiture électrique abordable… Ha oui, car j’ai oublié de mentionner un léger détail. Toute cette intelligence de la légèreté permet en outre à Dacia de réduire les coûts et de proposer la voiture électrique la moins chère du marché, rien que ça ! Car cette Spring s’échange à 16.990 €, hors bonus de 4.587 € qui vous permettra de ne débourser que 12.403 € pour avoir votre petit SUV électrique… et encore, sans aides régionales ou offres de reprises dont vous pourriez disposer.
Pour terminer sur les vertus de la légèreté, cette fameuse « petite » batterie a en outre l’avantage de se charger rapidement (14 h sur une prise domestique, 5 h sur une Wallbox 7,4 kW).
A l’intérieur
Clairement, amis des plastiques moussés, des garnitures en cuir et bois précieux, passez votre chemin !
Mais si les matériaux ne font pas rêver, l’ensemble de l’habitacle respire la solidité et la simplicité. Aucune faute de goût n’est à noter : l’essentiel est là et tombe sous la main.
On se sent globalement à l’aise, même si mon 1m90 aurait aimé que le siège se règle en hauteur, et qu’il se recule un peu plus. Mais néanmoins, 4 adultes d’1m80 se sentiront tout de même à l’aise… et pourront même profiter d’un coffre étonnamment vaste de 270 l (et plus de 600 l banquette rabattue).
Sur la route
Et sinon, sur la route, comment se comporte notre poids plume électrique ? Étonnamment bien… notre petit moteur de 44 chevaux, qui ne nous permet qu’une vitesse de pointe de 125 Km/h et un 0 à 100 Km/h en 19,1 secondes ne démérite pas en usage réel. En effet, le couple disponible instantanément permet des accélérations raisonnablement vives jusqu’à 70 Km/h, voir 80 Km/h et ainsi de se faufiler dans les villes et les départementales sans frustration et sans se faire peur. L’ensemble dans un silence et un confort appréciable.
Alors bien entendu, tout n’est pas parfait. L’absence de repose pied est un peu déroutante pour le conducteur et la direction est un peu floue. Par ailleurs, on regrettera de ne pas pouvoir conduire en n’utilisant qu’une seule pédale (avec un « frein moteur » prononcé, comme sur la BMW I3 ou la Nissan Leaf).
Dacia is right
Mais à l’issue de l’essai, on a bien envie de pardonner ces choix et ces contraintes et on ne peut qu’être admiratif de voir qu’il est possible d’avoir, pour moins de 17.000 €, une vraie voiture aussi à l’aise en ville que sur les départementales.
Avant de rendre les clefs, en suivant gentiment un Porsche Taycan Turbo (à peu près 10 fois plus chère mais disposant de plus de 600 chevaux supplémentaires), je me dis que la révolution électrique est en marche, avec désormais des offres capables de répondre à tous les besoins… et à toutes les bourses. Encore une fois, Dacia fait tomber les barrières et et démontre que « c’est possible ! ».